« Ceux qui ont crevé les yeux du peuple lui reprochent d’être aveugle »
John Milton (1608 – 1674)
Gérer l’opinion d’un groupe, influencer ses décisions, rendre son comportement uniforme afin que
ses réactions s’inscrivent dans le domaine du prédictible, relève d’une pratique inhérente à l’histoire
de l’humanité. Que cela soit par l’édification de temples et de statues rappelant à tout un chacun le
quotidien d’un certain ordre, ou que ce soit par la diffusion de légendes autour d’un chef, d’une
lignée, afin de valider l’évidence et le bon droit de leur règne, la manipulation de l’information ou
l’adaptation des récits dans l’intérêt du détenteur de l’autorité, peut s’illustrer par le factuel tout au
long de notre histoire.
Par contre, généraliser cette pratique au point d’en faire un concept indissociable de nos formes de
gouvernances, formater le citoyen pour systématiser ses actes, lui imposer l’irrationnel en guise de
comportement, fabriquer son consentement pour les intérêts d’une élite politique ou d’un groupe
privé, tout cela a une origine que l’on peut pointer dans le temps au tout début du 20ème siècle, et que
l’on peut localiser, en Angleterre, aux USA. Adoptée et appliquée par la suite, par tous les pays
démocratiques, cette pratique, nommée par ses concepteurs « la fabrication du consentement », eut
un impact qui la rendit d’autant plus efficace, que son évolution suivit celle des avancées
technologiques en matière de communication et de diffusion de l’information. Aujourd’hui en 2022,
dans une société de l’absurde flirtant avec son apogée, la zone de cerveau disponible chez les
individus lambda n’offre plus assez d’espace libre pour le bon sens, la cohérence. En effet, ajouté au
matraquage des médias traditionnels, l’internet a depuis maintenant deux décennies, contribué sans
que cela soit son but initial, à la diffusion de la confusion dans ce marasme informatif.